Le financement de la santé en RD Congo : est-il possible d’obtenir des ressources financières suffisantes ?

Chaque année, le secteur de la santé de la RDC connait d’énormes déficits budgétaires. Pour la période 2016-2020, le gap équivalent en dollars américains est estimé à 305 millions (PNDS 2016-2020, p.14). Cela empêche l’exécution de certaines activités planifiées dans le PNDS 2026-2020. On déplore des taux élevés de mortalité maternelle (814/1000) et infanto-juvénile (131/1000) et bien d’autres conséquences (EDS-RDC 2013_2014). Dans ce contexte, l’atteinte de l’objectif de couverture sanitaire universelle devient difficile. Est-il possible d’obtenir des ressources financières suffisantes? Je crois  »oui », seulement à une condition. Le Ministre congolais de Santé recommande une chose (Cf. Déclaration sur la photo).

Portrait de Dr Oly Ilunga, Ministre de la Santé, RDC, (c) 2017. Photo : Global Financing Facility/World Bank Group. 

Cependant, l’exécution de la recommandation du Ministre peut sembler difficile tant que le budget de la santé dépend à 90% du financement extérieur et du secteur privé. D’ici 2020, il est prévu une baisse d’environ 80% du financement extérieur du système de santé, passant de 718.000.000 $US en 2016 à 124.000.000 $US en 2020. En outre, les ménages qui ont supporté en 2016 les dépenses courantes de santé à hauteur de 652.139.881 $US (Cf. Rapport annuel 2017 du Ministère de Santé) s’appauvrissent petit à petit.

Le dialogue entre le ministère de la santé et les partenaires extérieurs parait soutenu. Bien que les budgets alloués au secteur baissent d’année en années par rapport à ceux planifiés : 45% (2016) et 36% (2017), ce dialogue ne semble pas très soutenu avec d’autres ministères (Finances, Economie…), le secteur privé, les élus… pour mobiliser les ressources nationales. Le contexte est aussi complexe, dominé par des influences sociopolitiques, il est parfois difficile de convaincre tout le monde pour générer les ressources financières planifiées, mais ce n’est pas impossible. Les cultures de taxe et de cotisations sont généralement quasi-absentes. Il faut plus de réunions de coordination avec les bailleurs pour essayer de les convaincre à respecter la Déclaration de Paris (Cf. p.4-7), une régulation du système malgré la multiplicité des détenteurs d’enjeux socioéconomiques. Le plaidoyer auprès du Gouvernement pour qu’il alloue 15 $US/an/per capita d’ici 2020 tel que promis est nécessaire. La stratégie de financement de la santé adoptée en 2018 devrait être mise en œuvre, suivie et évaluée.

Pour augmenter les ressources, l’Organisation mondiale de la Santé recommande quatre mesures (Cf. p.10-12), à savoir : augmenter l’efficience de la collecte des fonds (impôts…), reconsidérer les priorités des budgets nationaux, recourir au financement innovant et à l’aide au développement en matière de santé. Moi je crois qu’il est possible d’obtenir, à moyen ou long terme, des ressources financières suffisantes, à condition que le défi de la bonne gouvernance financière soit relevé. Cette bonne gouvernance requiert la participation, l’équité, l’efficience, l’efficacité, l’élimination de gaspillage et de corruption. Elle nécessite la régulation du secteur, la transparence dans la collecte, la mise en commun et l’achat, la redevabilité et la pérennité. Il faut dialoguer, motiver et coordonner tous les acteurs capables de contribuer à la bonne gestion des ressources financières mobilisées.